Cas civ 1ere 7 nov 2000
( 2 arrêts )

Le 1er arrêt précise que le notaire engage sa responsabilité s'il accepte le contrat de cautionnement authentique conclu en vertu d'un mandat de cautionnement sous seing privé dépourvu des mentions manuscrites. En effet, il est de jurisprudence constante que le mandat de se porter caution est soumis aux mêmes règles de preuve que le contrat de cautionnement lui même c'est à dire qu'il doit comporter la signature des parties ainsi que la mention manuscrite portant montant de la somme cautionnée, ou définissant l'étendue de l'engagement dans le cas d'un cautionnement indéfini.
Par conséquent, la responsabilité du notaire peut être valablement engagée sur le terrain de l'article 1382. La faute est constituée par l'acceptation de passer l'acte authentique, le préjudice est constitué par l'inefficacité possible du contrat de mandat et donc la constitution d'un cautionnement à la charge du mandant. Toutefois, il est nécessaire qu'il existe un lien de causalité entre les deux éléments et d'autre part, on sait que depuis 1989, la jurisprudence n'exige plus les mentions de l'article 1326 qu'à titre de preuve, il en résulte que la preuve de l'existence du contrat de mandat peut être rapportée par des éléments extrinsèques tels la qualité de dirigeant du mandataire.

Le second arrêt donne une deuxième hypothèse où la responsabilité du notaire peut être engagée: il s 'agissait en l'espèce d'un notaire qui voit sa responsabilité engagée au motif qu'il n'avait pas avertie suffisamment les deux cautions de la gravité de leur engagement. Les juges du fond avait retenu que le notaire n'avait commis aucune faute dès lors que l'acte était clair, qu'il n' y avait pas de disproportion entre le cautionnement et les revenus des cautions et que les cautions étant de la famille du dirigeant, ils disposaient de toute les informations nécessaires à mesurer l 'étendue de leur engagement.
Ainsi, s'il est souvent question en jurisprudence de la responsabilité des créanciers - particulièrement celle des banques -, cet arrêt illustre la possibilité d'engager la responsabilité d'un tiers à la relation triangulaire constituée par le cautionnement.
Cette solution si elle paraît imposer au notaire une obligation de conseil lourde et pas nécessairement justifiée est cependant plus équilibrée que celle qui imposait au créancier un devoir d'information voire de conseil en ce sens que le créancier ne pouvait à la fois poursuivre son intérêt et dissuader la caution de contracter. En revanche, le notaire est étranger à cette relation et peut donc conseiller en toute objectivité. De plus, on peut comprendre la sévérité de la cour en l'espèce ( le cautionnement n'était pas excessif, les cautions pouvait avoir accès aux informations ) dans la mesure où s'agissant d'un contrat de cautionnement, les mentions de l'article 1326 qui sont des facteurs de protection sont inapplicables et ainsi, tout un pan de la jurisprudence sur le cautionnement indéfini reste inapplicable. Le notaire peut cependant palier ce manque de protection. Enfin, s'il est vrai que les cautions appartenant à la même famille que le débiteurs principal peuvent avoir accès plus facilement à certaines informations, et mesurer ainsi l'étendue de leur engagement, la jurisprudence a parfois tenu compte de cette situation privilégiée pour libérer les cautions dans la mesure où celles-ci peuvent se trouver dans l'impossibilité morale et psychologique de rechercher les informations. Ainsi, en matière de dol, il avait été admis que le lien de parenté justifiait que l'obligation d'auto information pesant sur les cautions soient supprimée. De même, un autre arrêt, relevait pour écarter la réticence dolosive du créancier que les cautions au vu de leur lien de parenté et du montant élevé de leur engagement auraient dû s'informer sur la portée de leur engagement, c'est à dire en recherchant le montant des dettes du débiteur principal, comme si le simple lien de parenté était insuffisant (17 mai 1979 Bull, Aix 1979 II n°143 )
Ainsi, l'arrêt peut être une illustration de cette prise en compte des liens familiaux et ouvre une nouvelle voie de protection des cautions, bien que cela ne concerne que les cautionnements authentiques, moins critiquable que celle résultant de l'obligation de conseil pesant sur le créancier.